Forêt gourmande
Pourquoi implanter une forêt gourmande aux Assis ?
Quand nous avons acheté notre propriété, le grand champ de 2500 m² était en friche, précédemment occupé par un cheval. Nous avons hésité sur la manière de l’organiser : installer des moutons, planter une forêt ? Et nous avons découvert assez rapidement le concept de forêt gourmande, aussi appelé forêt comestible ou jardin forêt. Ce concept nous a parlé immédiatement, en lien avec notre souhait de développer notre autonomie alimentaire et de mettre en valeur le site des Assis par la création d’un écosystème riche en biodiversité.
La forêt gourmande s’allie naturellement à notre projet d’accueillir des petits groupes en formation ou des personnes en voyage, dans un espace naturel et préservé, afin de faire découvrir un modèle visionnaire pour l’avenir de notre société.
En décembre 2021, Eric est allé se former avec Fabrice Desjours, précurseur des jardins forêt en France depuis 15 ans. Depuis cette formation, Eric œuvre à la conception et à la préparation de l’implantation d’une forêt gourmande au sein de notre propriété.
Cet espace sera conçu pour accueillir les personnes de passage, avec des espaces de méditation, et nous l’espérons, à terme, un ou deux logements alternatifs implantés au sein de l’espace naturel. Nous souhaitons également ouvrir les portes de la forêt gourmande au public, aux enfants des écoles, des centres aérés notamment, afin de sensibiliser tout à chacun à l’importance de prendre soin de la nature et de réfléchir à des modes de consommation résilients.
Nous souhaitons créer du « nous », un espace de lien avec la nature et entre humains.
A propos des forêts gourmandes
Forêt comestible, jardin forêt, forêt gourmande… Autant de termes pour désigner un paysage comestible en trois dimensions avec des végétaux pérennes.
Il s’agit d’imiter le fonctionnement d’un espace boisé, de la lisière du bois à la canopée, en favorisant des espèces végétales diversifiées et nourricières.
Au bout de 3 ou 4 ans, quand les arbres ont un système racinaire suffisamment développé, la forêt gourmande devient quasi autonome. Il n’y plus besoin d’arroser et de pailler. Aussi, en introduisant des végétaux vivaces, il n’y a plus de semis, de repiquage ou de désherbage comme dans un potager classique ! On obtient ainsi un oasis d’abondance végétale qui s’auto-entretient.
L’engouement actuel pour les forêts gourmandes nous amène à nous questionner sur la provenance de notre alimentation.
Citons Robert Sapolsky, chercheur en neurobiologie à l’université de Stanford :
« L’agriculture est une invention humaine assez récente, et à bien des égards, ce fut l’une des idées les plus stupides de tous les temps. Les chasseurs-cueilleurs pouvaient subsister grâce à des milliers d’aliments sauvages. L’agriculture a changé tout cela, créant une dépendance accablante à quelques dizaines d’aliments domestiqués, nous rendant vulnérables aux famines, aux invasions de sauterelles et aux épidémies de mildiou. L’agriculture a permis l’accumulation de ressources produites en surabondance et, inévitablement, l’accumulation inéquitable ; ainsi la société fut stratifiée et divisée en classes, et la pauvreté finalement inventée ».
Jardins-forêts, un nouvel art de vivre et de produire, Fabrice Desjours
Nous savions que l’agriculture conventionnelle (ultra-mécanisée, fortement consommatrice de pétrole et utilisant des intrants à haute dose : pesticides, potasse, azote de synthèse,…) n’était pas durable, mais de là à remettre en question l’agriculture même, cela nous pensait impensable ! L’agriculture raisonnée et/ou biologique n’est-elle pas une alternative ?
Image extraite du site de l’info durable
Pour juger de la pérennité des modes de production d’aliments, il faut comparer les calories utilisées (pour produire et transporter les engrais et les pesticides, pour faire fonctionner des machines comme les tracteurs,…) aux calories alimentaires produites. De ce fait, la quasi-totalité des aliments vendus dans les commerces ne sont pas pérennes. L’agriculture dite biologique ne fait pas exception : elle reste très dépendante du pétrole (usage intensif des tracteurs notamment) pour ne prendre que cet exemple.
Quand on regarde les pics de production du pétrole et des autres intrants comme le potassium indispensable à la production des végétaux mais qui est importé dans nos champs en provenance de mines dont les réserves s’épuisent (40 ans maximum), on ne peut qu’être effrayé par ce constat : les humains ne pourront plus produire leur nourriture dans quelques décennies.
Alors, que faire ? Et bien, revenir à nos racines !
Avant l’invention de l’agriculture – et son corollaire la destruction des forêts – nos aïeux avaient fait des arbres leurs alliés.
Nous le savons depuis peu, la forêt primaire – vierge d’intervention humaine – est un concept très relatif. Même la forêt amazonienne fut travaillée par les peuples premiers. Ils favorisèrent certaines espèces qui leur étaient profitables (pour leur alimentation, pour se soigner, pour construire des habitats,…). Nos anciens allaient littéralement se nourrir dans la forêt.
La forêt se suffit à elle-même. Il s’agit d’un écosystème très complexe où la complémentarité et l’entraide permettent une autonomie complète.
Pour revenir sur l’exemple du potassium, le système racinaire des arbres et le réseau des mychorises vont le chercher en profondeur et l’apporter aux végétaux de surface.
Image extraite du site Arboplus
Une forêt gourmande mature est ainsi le système de production alimentaire le plus productif qui soit. La biomasse comestible créée à l’hectare est considérable et ne nécessite aucun intrant.
Toutefois, productif ne signifie pas pour autant rentable. Il est en effet difficile de mécaniser la récolte eu égard à l’aspect non linéaire de l’endroit. C’est en effet un joyeux enchevêtrement végétal !
La récolte nécessite ainsi beaucoup de temps humain.
Au regard de l’indisponibilité croissante de l’énergie (nombreux pics de production atteints), un recours accru à l’énergie humaine sera nécessaire. Le travail dans les champs (ou dans les forêts plutôt…) est promis à un bel avenir. Pour nous, cela n’est pas synonyme de régression et de dégradation du bien-être. Bien au contraire ! Quel bonheur d’être au contact de la nature et quelle joie d’avoir une relation directe et presque intime avec sa nourriture !
Alors que l’agriculture raisonne en deux dimensions, les forêts gourmandes sont – avec la verticalité – organisés en trois dimensions.
On distingue traditionnellement 7 strates :
- La canopée (arbres fruitiers ou nourriciers de plus de 10 mètres) : les châtaigniers, les pommiers sur franc,…
- Les arbustes (4 à 9 mètres) : fruitiers de moyenne tige, asiminiers (« la mangue du Nord »), « l’arbre salade » qui produit de délicieuses feuilles au goût de cacahuètes et d’oignons…
- Les buissons (jusqu’à 3 mètres) : strate des ronces sans épines : myrtilliers, groseilliers, goumis du Japon,…
- Les herbacées (dizaine de centimètres à 3 mètres) : mélisse, menthe, réglisse, artichauts,…
- Les légumes racines : ignames de Chine, topinambour,…Ces plantes restent en place année après année ou se ressèment spontanément le long des sentiers d’un jardin forêt
- Les plantes couvre-sol : fraisiers, champignons,…
- Les lianes qui grimpent le long de leurs arbres supports : vigne, kiwi,…
Cette organisation multi-strates apporte de nombreux bénéfices. Nous l’avons évoqué, les racines profondes des strates les plus hautes sont de véritables pompes à minéraux.
Aussi, l’organisation en strates permet de capter au mieux l’énergie du soleil et de produire ainsi cette imposante biomasse.
Un autre bénéfice des forêts gourmandes est leur meilleure résistance aux phénomènes climatiques extrêmes (tempêtes, sécheresse,…) permise par la complémentarité entre les strates : par exemple les arbres rafraichissant les strates les plus basses.
Bien pensé, une forêt gourmande peut ainsi apporter – à travers ses différentes strates – la totalité des macro-nutriments (protéines, lipides,…) et des micro-nutriments (vitamines, minéraux,…) essentiels à l’alimentation humaine tout au long de l’année.
Venez découvrir la forêt gourmande des Assis, vous y serez les bienvenus !